Originaux, ça veut dire quoi ? Ça veut dire non adaptés de manga, de light novel ou de jeux vidéos, mais créés de toute pièce spécialement pour l'occasion. Le but étant évidemment d'encourager les initiatives de créations originales dans une animation japonaise qui prend de moins en moins de risques et a fortement tendance à seulement servir de support de "soutien" aux autres média.
Jusque là je ne vous apprends pas grand chose, Tetho l'a d'ailleurs bien mieux décrit lors du lancement de ce projet, en tout début d'année. Son billet se plaçait en début de chaîne, alors qu'on nous annonçait trois titres pour cette fameuse case mais que nous n'en savions pas grand chose de plus (et qu'on nous faisait tout un foin sur la ressemblance de l'anime de lancement avec un certain titre de chez Kyoto Animation à la relative vacuité scénaristique).

Ce billet-ci se place en bout de chaîne, alors que les 3 anime en question ont tous été diffusés.
Cependant je ne suis pas en position de vous faire un véritable bilan exhaustif. Je n'ai regardé qu'une petite moitié de ce qui a été diffusé dans cette case. Même si j'essaierai de résumer un peu le tout, je ne pourrai vraiment détailler que le dernier de ces 3 anime, Seikimatsu Occult Gakuin, le seul que j'ai regardé en entier pour le moment.


Une bien faible mélodie

So.Ra.No.Wo.To

So.Ra.No.Wo.To, la première des trois séries qui devait lancer la case horaire, a trainé dès le début sa ressemblance (toute relative) avec K-on! comme un boulet. L'anime n'était même pas sorti qu'on nous prédisait déjà une "tranche de vie" (terme bien mal adapté d'ailleurs) moe sans profondeur ni intérêt. Comme d'hab, ce troll permanent renforce aussi le hype sur la série, mais les affrontements stériles entre les différentes parties ont tendance à masquer complètement l'aspect Lancement du projet Anime no Chikara, pourtant très important.

Me désespérant de voir encore et toujours tout le monde tomber dans le même piège, je regarde en espérant que A-1 donnera tort aux préjugés généraux, parce qu'un tel projet mérite bien mieux.

Sauf que... en fait je déchante assez rapidement.

On se rassure, c'est quand même de bien meilleur gout

Niveau ambiance et univers, la série n'est pas comparable à K-on!. Elle est plus posée, plus contemplative, reposante non pas pour le cerveau mais bien pour l'esprit. De toute façon, la présence de Yuki Nagato ne peut que la rendre supérieure à ce qui semble alors admis (à tort) comme nouveau mètre étalon du lolipedomoe blobesque...

Mais le contenu s'avère lui bien vite assez restreint. En plus de dénaturer le character design original de Mel Kishida et d'avoir la mauvaise idée d'arborer un générique rappelant celui d'Elfen Lied (et pour cause : même créateur, même inspiration des œuvres de Klimt), le début de So.Ra.No.Wo.To possède bel et bien la vacuité et le manque de développement qu'on lui reprochait avant même d'en voir ne serait-ce qu'une seconde.

Aussi lorsqu'après quelques épisodes la licence est acquise par Kazé qui diffuse alors La Mélodie du Ciel (sûrement la meilleure traduction qu'on pouvait faire de ce titre) sur sa plate forme de VOD KZPlay, je n'ai pas vraiment de regrets à l'abandonner. Je ne compte pas payer pour regarder la suite d'épisodes qui ne m'ont pas convaincu. Et je pense ne pas avoir été le seul.

Je suis néanmoins prêt à reprendre si on me montre le contraire, mais malheureusement les avis finaux sur la série ne font que confirmer ce triste constat : Malgré certaines qualités indéniables, So.Ra.No.Wo.To n'a pas la carrure nécessaire à une série de lancement d'un projet de ce type, comme pouvait l'avoir Honey and Clover pour la case noitaminA, pour prendre un exemple à l'ambition similaire.

Dommage, c'était joli quand même...


Des espions trop bien cachés

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En avril, directement après la fin de la série précédente, c'est au tour de Senkou no Night Raid d'être diffusée.
Son histoire d'espions japonais avec des pouvoirs spéciaux dans la Mandchourie des années 30 avait de quoi lancer un joli débat. En effet toute mention japonaise de cette partie de l'histoire de l'extrême orient voit planer sur elle l'ombre d'un révisionnisme latent, même si le studio se défend à la fin de ses épisodes d'avoir une quelconque intention de déformer les faits historiques, et tout ça promet donc de joyeuses engueulades sur le bien-fondé d'un anime reprenant ce contexte historique compliqué. (C'était même peut-être un peu voulu)

Sauf que... Bah tout le monde s'en tape.

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Pourquoi ? Parce qu'au moment de sa sortie, quelqu'un d'autre a pondu encore beaucoup plus gros et gras, et il y a donc un troll beaucoup plus amusant à nourrir. Celui-ci ne nécessite pas d'avoir pris le moindre cours d'histoire, ni réellement d'activer son cerveau. Senkou no Night Raid passe donc totalement inaperçu, et bien rares seront les personnes à la suivre. Je n'en fais pas partie, j'ai même la honte d'avoir plongé comme tant d'autres sur l'appât le plus facile.

Pourtant dans cette série des efforts sont faits pour rendre l'ensemble un minimum attirant et crédible.
Le character design original est signé Akimine Kamijō, la mangaka de Samurai Deeper Kyo (le design général étant à peu près la seule chose à sauver dans ce manga). Les dialogues en dehors du cercle d'espions japonais se font en mandarin et en russe. Si les japonais ont un accent qu'on devine à couper au couteau, les personnages censés être natifs de la langue ont des prononciations beaucoup plus honorables (je ne suis cependant pas spécialiste de ces langues.), rendant le tout assez bien tenu.


Sauvons la case en l'inondant de sciences occultes

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A partir de juillet et toujours sans temps mort, c'est donc après un So.Ra.No.Wo.To bien peu fédérateur et un Senkou no Night Rail que presque personne n'a regardé en entier que commence la diffusion de Seikimatsu Occult Gakuin.

Au début on nous balance un teaser assez intriguant :

Et ça nous vend une série assez sérieuse, avec un scénario un peu construit et une animation soignée. On nous présente une intrigue basée sur les différentes prophéties de fin du monde qui navigue entre 1999 et 2012, on place l'action à Mina kami yama, site célèbre pour avoir été le théâtre de phénomènes inexpliqués dans les années 60, on nous montre des voyageurs temporels et des monstres en tout genre, on nous parle de Nostradamus et on nomme l'un des personnages principaux Maya, histoire de vraiment faire un joyeux melting-pot à fond dans son trip.
Ladite Maya se tape d'ailleurs une sacré classe et a l'air d'avoir bien la pèche. Le character design donne des bonnes bouilles rondelettes, comme on peut en trouver chez bones, ce qui n'est pas pour déplaire. On le doit en fait à Gatou Asou, qui avait officié sur Seirei no Moribito et qui avait fait un boulot plutôt correct dessus.
On trouve aussi des noms de gens ayant officié sous les ordres de Mamoru Hosoda ou de feu Satoshi Kon. Donc ca annonce vraiment du très sympathique. Il était temps.

Et puis les premiers épisodes sont diffusés. Et là on s'aperçoit qu'on n' avait pas tout compris.

Une scène juste magnifique

On se prend dans la gueule une série franchement improbable, avec bien une trame construite mais qui joue carrément plus sur la comédie.
Et quelle comédie. La très bonne qualité d'animation est mise au service de situations souvent originales et très bien inspirées. Les producteurs se permettent des choses assez osées, un peu sur le fil du rasoir, mais veillent à toujours rester du bon côté.

Sans être transcendant ou génialissime, ce début de série est tout de même excellent et regorge de bonnes idées. On est clairement confiants pour la suite et on se dit qu'il était temps que le projet décolle enfin.

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Sauf que...

Malheureusement tout ça ne dure pas bien longtemps.
Au bout de quelques épisodes, la trame scénaristique, le fil conducteur qu'on nous avait servi au début, devient de plus en plus ténu et la série s'en éloigne longuement pour ne faire que des petites histoires pas très intéressantes et sans rapport avec le sujet de départ.
L'humour s'estompe. Il devient répétitif, lassant, et perd une grande partie de son inventivité. L'animation se dégrade elle aussi peu à peu. Je ne sais pas si c'est les mecs du studio Xebec venus en renfort qui ont chié dans la colle ou si c'est simplement que le budget du projet fut épuisé trop vite, mais clairement, ça devient moche. C'est d'autant plus frappant car cela contraste énormément avec la qualité du début.

QUALITY

En bref la série retombe et se ratatine comme un mauvais soufflé.

Chose encore plus navrante quand au 11e épisode (sur 13), les gens du studio semblent soudainement se rendre compte qu'il ne leur reste que 3 diffusions pour conclure une intrigue qu'ils ont complètement laissé en plan depuis le tout début. Du coup ça donne un enchaînement de révélations WTFesques (même si on se doutait clairement de la plupart) , de soudains changements de personnalités / comportements et des dialogues à la limite du pathétique.
Une erreur classique de scénariste débutant, en somme.

En fait Occult c'est Nanoha, mais avec des vieilles

Le final s'avère plutôt sympathique, même si forcément expédié assez vite, il remonte un peu l'ensemble. Mais on attendait quand même bien mieux de ce projet. Difficile de ne pas appeler ça du gâchis. Les personnages étaient sympa, l'univers était pas mal du tout, l'intrigue était intéressante... en clair les idées étaient là. Les moyens, la volonté et le talent étaient là aussi au début, alors où sont-il passés ?


Que faire de Anime no Chikara ?

Après la diffusion de ces trois anime, la case Anime no Chikara sera suspendue pour une durée encore inconnue. Le temps pour les différents responsables du projet de réfléchir à quoi faire pour la suite. Sa survie elle-même est probablement remise en cause, et il est donc possible qu'on n'en entende plus parler.

Mais est-ce bien un mal ?

Le pouvoir occulte des anime

Malgré sa très louable volonté de promouvoir les anime originaux, Anime no Chikara n'a pour l'instant réussi qu'à mettre en lumière la grande difficulté actuelle des studios à produire eux-même de la nouveauté. On peut se demander si ce relatif échec (c'est pas un désastre non plus heureusement) ne va pas au contraire encourager les acteurs à continuer de plus belle à faire au moins risqué : c'est à dire produire des adaptation des derniers Visual / Light Novels à la mode.

Seikimatsu-Occult-Gakuin.jpg Il est regrettable que ce projet n'ait pas su se donner les moyens nécessaires à ses ambitions, du moins pour l'instant. Les fluctuations de qualité sur Seikimatsu Occult Gakuin montrent bien que les différents supports (possiblement financiers) n'ont pas toujours suivi. Cet essai est un nouveau pas courageux pour sortir d'un fonctionnement malsain aliénant la créativité, mais cette ambition demande vraiment qu'on y croie un peu plus. Et qu'on s'y prenne un peu mieux.

Je pense qu'un des gros reproches qu'on peut faire à ce projet au niveau de sa mise en œuvre a été de donner "l'exclusivité" de l'animation au seul studio A-1 Pictures. Malgré quelques titres de qualité à son actif, ce studio est encore jeune. Peut être un peu trop pour mener de front 3 projets originaux à la fois. Et une telle structure nuit potentiellement à la diversité.
Regardez la liste des titres diffusés sur noitaminA, case à l'ambition similaire dont le succès n'est plus à prouver. Dans les premiers titres, on constate que différents studios ont été impliqués. On trouve des noms comme JC Staff, Madhouse, Bones...

Certains titres suivants comme Higashi no Eden rentreraient parfaitement dans la philosophie recherchée par Anime no Chikara, et se tiennent quand même bien mieux que les essais détaillés plus haut.
Comme quoi quand on y met les moyens, ça a quand même une autre gueule non ?
Et cette diversité, ne serait-elle pas nécessaire pour assurer la pérennité d'un tel projet ?

Seulement, si les choses ont été faites ainsi, ça n'est pas sans raison.
Anime no Chikara, souvenez-vous, est une collaboration entre TV Tokyo et Aniplex.

A-1 Pictures Or, Aniplex est justement fondateur et propriétaire de A-1 Pictures. Il est évident qu'Aniplex a tout intérêt à "imposer" son studio à la réalisation du projet. AniplexAvec un brin de paranoïa, on peut même s'interroger au final : La case Anime no Chikara a-t-elle été montée pour promouvoir les anime originaux ou pour promouvoir A-1 Pictures ?

De mon point de vue, pour la suite il faut donc que TV Tokyo soit le réel décideur du projet, et qu'il ait la liberté de pouvoir varier les studios pour la réalisation, Aniplex pouvant rester le producteur / sponsor majoritaire des anime produits, comme il le fait déjà sur de nombreuses autres séries en dehors de ce projet .

TV Tokyo

Toute la question est de savoir s'il sera aisé de changer ce fonctionnement un peu caduque ou s'il vaudra mieux simplement créer un "nouveau" projet aux ambitions similaires pour remplacer Anime no Chikara.