Un comics sous acide : Transmetropolitan
Par Caius le mardi 3 août 2010, 00:02 - Comix - Lien permanent
Une fois n'est pas coutume je viens donc vous parler de comics, de Transmetropolitan écrit par Warren Ellis et dessiné par Darick Robertson. C'est sorti chez Panini Comics dans la collection Vertigo en 6 volumes.
Pourquoi "Sous acide"? D'une part car ce comics est totalement barré mais surtout à cause des propos caustiques du personnage principal, un journaliste pratiquant le journalisme "gonzo".Commençons par quelques explications : "Journalisme gonzo"
Je vous vois venir bande de vicieux, que tout ceux qui ont pensé "du journalisme pornographique" sortent du rang. Ça porte le même nom mais ça ne vas pas plus loin.
Selon cette saloperie de Wikipédia : Gonzo (de l'argot (slang) irlandais du Sud de Boston) décrit le dernier homme debout après un marathon alcoolisé
C'est donc un type de journalisme qui se démarque sur sa collecte d'information. Le concept est simple pour pouvoir critiquer il ne suffit pas d'observer votre sujet, il faut se mettre à sa place et vivre l'expérience du sujet. Là où un journaliste classique pourrait écrire " dans le pub X de Glasgow s'est déroulé un marathon alcoolisé" le journaliste gonzo écrira "j'étais au pub X pour le marathon alcoolisé, en tant que poivrot invétéré je me suis lancé dans l'aventure. Le chalenge n'était pas bien haut, j'en tiens pour preuve : votre serviteur l'a emporté ". Du fait de l'expérience le récit est à la première personne et introduit un jugement de valeur. A ce moment là ce n'est plus du journalisme me direz vous ; si car le journaliste se livre lui même à travers ses articles afin de permettre au lecteur de comprendre la réalité première transformée par son récit. En gros "il est impossible de produire une objectivité parfaite, donc j'assume les déformations de ma vision du monde tout en expliquant ces déformation pour permettre à votre esprit critique de corriger le récit afin apercevoir la réalité des faits."
Parmi les fers de lances de ce procédé journalistique, le plus connu est Hunter S. Thompson pour son livre Hell's Angels qui décrit sa plongée dans l'univers la célèbre bande de motards. Pongée dont il ne ressortira pas indemne, ça se terminera à l'hôpital. Mais aussi et pour Fear and Loathing: On the Campaign Trail '72 et surtout pour Fear and Loathing: In Las Vegas qui sera adapté au cinéma par Terry Gilliam, (Las Vegas Parano en France). Raoul Duke interprété par Johnny Depp est donc directement inspiré par Thompson.

Bon tout ceci est bien gentil mais c'est d'un comics dont il est question ! Et justement le personnage principal de ce comics est lui aussi très largement inspiré de Hunter S. Thompson. Que ce soit au niveau du physique ou du comportement tout chez Spider Jerusalem ressemble ni plus ni moins qu'à une caricature du journaliste : il est violent, abuse de l'alcool et de toutes sortes de drogues et surtout possède un sens critique très aiguisé.

Mais dans tout ça de quoi ça parle?
Le principe est on ne peut plus simple : placez le journaliste le plus irrévérencieux du vingtième siècle dans un monde futuriste cyber-punk créé sur mesure pour qu'il puisse se défouler à sa guise et vous obtiendrez Transmetropolitan. Tout simplement jouissif !


Cependant, l'univers qui nous est proposé oscille constamment entre cette utopie et le trash dû aux problèmes éthiques engendrés par cet apparent progrès. Ainsi le clonage est monnaie courante, la vidéo surveillance est omniprésente. La télévision diffuse des bombes publicitaires qui par hypnose forcent leurs victimes à rêver de publicité toute la nuit. La pornographie est joyeusement mêlée aux programmes pour enfants. La vie et le corps humain sont totalement désacralisés. La nourriture est produite par clonage ce qui permet des extravagances sordides : viande de koala, yeux de bébé phoques pied humain frit et autres bizarreries. Même sur le plan social cette "utopie" est mise à mal. Fidèle au modèle américain où l'individualisme est roi, la violence y est totalement banalisée et les médias y prennent de plus en plus de place. Les inégalités sont tellement grandes que les États Unis d'Amérique est le dernier pays de la planète à avoir conservé les maladies dût à l'extrême pauvreté : carence, gale, malnutrition et cetera...
Tout cela parait grotesque mais en y regardant plus près apparait une critique plutôt fine nos sociétés actuelles et de la pente douce sur la quelle elles dérapent.
Bien sûr Spider n'hésite pas a dénoncer tout cela et se fait un devoir d'aller bousculer, à coup de "testicules d'assaut" ceux qui détiennent le pouvoir de faire évoluer les choses.
Tout ceci n'est pas sans risques.

Il va sans dire qu'il se met rapidement la police et les services secrets à dos et l'absence de séparation des pouvoirs n'arrange rien à l'affaire. Jérusalem n'aime pas vraiment les uniformes. Et ils lui rendent bien. La violence étant omniprésente ces derniers n'hésitent pas à ouvrir le feu sur des civils, ou à les massacrer à coup
Passage à tabac, tentative d'assassinat de tout poil, notre journaliste a décidément une vie bien agitée.

Cependant le vrai danger vient de Spider Jérusalem lui-même:
D'une part il consomme une quantité phénoménale de psychotropes en tous genre. Suffisamment pour faire des black-out à répétition. Ses deux


Warren Ellis réussit le tour de force de nous offrir un comics qui reste haletant alors que la fin semble tout désignée. Le personnage principal a mis plein gaz droit sur un mur. Qu'est-ce qui nous tient en haleine? Tout simplement en laissant la question "A quel point tout cela va-t-il pouvoir dégénérer ?" totalement ouverte.
Il ne me reste plus qu'a vous parler de la réalisation :
Une bonne partie du comics est présenté sous la forme de bouts d'articles de spider ou des extrait de ses romans incrustés dans une illustration en pleine page. Les phylactères sont donc absents, ce qui laisse tout le temps de se plonger dans l'univers graphique de Darick Robertson. Les dessin sont très beaux, très colorés, fourmillent de détails et comptent surement encore bien plus de références que toutes celle que j'ai pu repérer. Le tome 6 donne l'occasion de découvrir l'interprétation du même univers vu par des dessinateurs différents dans le même exercice de la pleine page. Ça donne un jeu amusant pour la plus part, genre Où est Charlie avec des détails trash.
Dans le reste de l'histoire nos chères "bulles" reprennent du service pour nous replacer au temps du récit. Les détail et références sont moindres mais ne sont pas absents pour autant. Ces passages font la part belle à l'action. Et de l'action il n'en manque pas. Entre les expéditions punitives contre les fanatiques religieux et les déboires avec les forces de l'ordre, Transmetropolitan n'usurpe pas une seconde son logo "Pour lecteurs avertis".
Une bande dessinée déganté avec un super univers graphique, une bonne dose d'action et un univers pertinent et intelligent qui arrive à vous tenir en haleine jusqu'au bout. Je vous laisse découvrir par vous même la fin. Personnellement je l'adore! Que demander de plus ? C'est pour l'instant ce que j'ai pu lire de mieux en comics. (Bon d'accord je ne suis pas une référence en la matière)
Transmetropolitan fait partie de mes trois œuvres préférées concernant le neuvième art. Seul le prix du tome peut être un frein a l'achat de cette bombe : 29 € le tome, Panini n'y vas pas avec le dos de la cuillère... Toutefois je ne regrette en aucune manière cette investissement.

Au delà mes délire mégalo-maniaque de juge du bon gout universel, Waren Ellis, au travers de son personnage a le mérite de nous balancer un magistral "Mais putain, réfléchissez bande de cons !" dont les lecteurs /auditeurs / téléspectateurs actuels ont manifestement bien besoin au vu du niveau intellectuel de plus en plus bas des médias et de nos systèmes politiques. Et ça, putain, ça fait du bien ! Un titre à posséder absolument.

Commentaires
Spider <3.
L'Église Serbe Officielle de Tesla vaincra.
Pas mal Caius, j'ai noté deux trois fautes à droite à gauche mais on ne t'en voudra pas pour ça. L'article est sympa et bien présenté :).
Aer > si tu avais vu l'article avent le passage de Kabu ... Je suis une vrai catastrophe en orthographe.
merci qui? fau que je chope le dernier...
j ai loupe un T honte a moi, mais je suis un clavier qwerty pour ma decharge...
Le film sortit au cinéma est bien fear & loathing in las vegas. Mais le film est tiré du livre éponyme, fear & loathing in las vegas (las vegas parano en france, pareil pour le film) sortit en 1971.
fear & loathing on the campaign trail '72 c'est la campagne présidentielle de 72
mais fear & loathing in las vegas c'est deux gars qui se défoncent à las vegas en essayant de trouver le rêve américain.
Sinon la BD à l'air intéressante !
Merci duke pur cette correction. J'ai édité mon billet.
Je doit avouer n'avoir vu las vegas parano qu'après l'avoir écrit.